Chapitre 9
Administration de produits sanguins
Introduction
Ce chapitre concerne les principes qui régissent une pratique transfusionnelle sécuritaire. Son objectif est de fournir un certain nombre de connaissances aux professionnels amenés à prescrire ou à réaliser des transfusions de composants sanguins (globules rouges, plaquettes, plasma) et de produits plasmatiques. Les critères minimaux requis pour une pratique sécuritaire et efficace de la transfusion sont définis par plusieurs normes et directives, à savoir la norme Sang et produits sanguins labiles1 de l’Association canadienne de normalisation; les Normes pour services transfusionnels en milieu hospitalier2 de la Société canadienne de médecine transfusionnelle; la Ligne directrice : Règlement sur le sang3 de Santé Canada; les Standards for Blood Banks and Transfusion Services4 de l’AABB et la Transfusion Medicine Checklist5 du College of American Pathologists. Les politiques et procédures de chaque établissement hospitalier doivent inclure des mécanismes permettant d’assurer la formation continue et l’évaluation du personnel qui joue un rôle dans le processus de transfusion sur le plan des connaissances théoriques et pratiques.
Considérations prétransfusionnelles
Gestion du sang du patient
La gestion du sang du patient est une approche interdisciplinaire fondée sur des données probantes dont le but est d’améliorer les résultats pour les patients en leur évitant des transfusions inutiles pendant leur traitement6. Pour les patients qui doivent subir une intervention chirurgicale, l’approche peut consister à optimiser le taux d’hémoglobine du patient par l’administration de fer et d’érythropoïétine ainsi qu’à évaluer les possibilités de correction d’une éventuelle coagulopathie avant l’opération7. Pour les patients non chirurgicaux, des solutions permettant d’éviter ou de limiter le recours à la transfusion doivent être envisagées chaque fois que possible.
Décision de recourir à la transfusion
La décision de procéder à la transfusion d’un composant sanguin ou d’un produit plasmatique doit être prise par un fournisseur de soins de santé (un médecin ou un autre professionnel de la santé autorisé à prescrire une transfusion), et ce, conformément à des lignes directrices fondées sur des faits dans le domaine de la pratique transfusionnelle. Cette décision est souvent prise après consultation avec un médecin ayant une expertise en médecine transfusionnelle. Aussi, même si les résultats des analyses prétransfusionnelles préconisent le recours à la transfusion, il est bon d’effectuer une évaluation clinique des symptômes et un examen des mesures des résultats avant de décider de procéder à une transfusion.
Consentement éclairé
L’obtention du consentement éclairé du patient à la transfusion est une exigence de sécurité standard8. En effet, à l’issue de la Commission d’enquête sur l’approvisionnement en sang au Canada, le juge Krever a insisté sur l’importance du consentement éclairé du patient avant l’administration de composants sanguins et de produits plasmatiques9 :
- Que les organismes de réglementation de la profession médicale prévoient dans leurs normes de pratique que le médecin traitant doit obtenir le consentement éclairé du patient à qui du sang ou des produits sanguins doivent être administrés, de telle sorte qu’au Canada les patients, sauf lorsqu’il y a contre-indication ou qu’une intervention chirurgicale est requise de toute urgence, soient informés des risques et des avantages d’une transfusion de sang allogénique ainsi que des méthodes de rechange possibles9. (p. 1133, annexe A)
- Que l’information sur les risques, les avantages et les méthodes de rechange soit diffusée dans une langue facile à comprendre pour les patients et de façon à autoriser les questions et les répétitions, et à laisser aux patients le temps voulu pour assimiler la matière9. (p. 1133, annexe A)
Il incombe aux établissements de soins de santé de mettre en place des politiques et procédures qui régissent l’obtention du consentement éclairé pour la transfusion de composants sanguins ou de produits plasmatiques. Toute demande de consentement éclairé doit comprendre les éléments suivants8 :
- une description du composants sanguin ou produit plasmatique;
- une description des risques et avantages associés à la transfusion, y compris les risques de décès;
- une description des choix possibles, selon les circonstances cliniques, et des risques et avantages associés à chacun.
Si possible, une discussion entre le fournisseur de soins de santé et son patient doit avoir lieu bien avant l’intervention chirurgicale ou thérapeutique afin de permettre au patient de se renseigner sur d’autres solutions.
Le fournisseur de soins de santé doit consigner les résultats de la discussion qu’il a eue avec le patient concernant les risques et les avantages d’une transfusion, et les solutions alternatives, conformément aux politiques de l’établissement. Pour plus d’informations, voir le cours Informed consent for blood transfusion sur notre portail éducationnel.
Refus éclairé
Les patients ont le droit de refuser de se soumettre à une transfusion ou à tout traitement utilisant des composants sanguins ou produits plasmatiques. Outre la discussion avec le fournisseur de soins de santé sur les risques et les avantages d’une transfusion, et sur les solutions alternatives au recours à l’utilisation de composants sanguins ou produits plasmatiques, il convient de discuter des risques liés à un refus si le patient choisit cette voie. Tout refus doit également être consigné au dossier médical du patient, conformément à la politique de l’établissement de soins.
Il arrive que des patients refusent un traitement utilisant des composants sanguins ou produits plasmatiques pour des raisons personnelles ou par conviction religieuse. Les Témoins de Jéhovah en font partie, mais certains acceptent de prendre de l’érythropoïétine humaine recombinante et certains produits plasmatiques10. Chacun est libre de décider de ce qui lui semble acceptable. En cas de refus, le formulaire de refus rempli par le patient doit indiquer clairement les motifs de sa décision. Pour plus d’informations, veuillez contacter la ligne d’urgence du service d’information hospitalier des Témoins de Jéhovah pour le Canada au 1-800-265-0327 (accessible 24 h/24) ou allez sur JW.org10.
Prescriptions de transfusions
La prescription de transfusions de composants sanguins ou produits plasmatiques se fait par le fournisseur de soins de santé sous forme d’ordonnances et doit aussi comprendre l’indication clinique. Une ordonnance doit comprendre ce qui suit2 :
- le nom complet du patient;
- le numéro d’identification unique du patient (émis par l’établissement);
- le type de produit à transfuser;
- le volume ou la quantité à administrer;
- la durée ou le débit de perfusion (certains établissements peuvent se référer à une procédure qui détermine un débit standard);
- la date et l’heure de la transfusion;
- l’ordre dans lequel les produits doivent être transfusés (lorsque plusieurs produits sont prescrits en même temps);
- l’utilisation de perfuseurs sous pression, le cas échéant;
- l’utilisation de réchauffe-sang, le cas échéant;
- les modifications, s’il en est, à apporter aux composants sanguins;
- les exigences transfusionnelles particulières, s’il y a lieu;
- les traitements médicamenteux associés à la transfusion, s’il y a lieu, y compris la posologie, la voie d’administration et le moment où ils doivent être administrés, c’est-à-dire avant, pendant ou après la transfusion. Par exemple :
- si le patient présente des antécédents de réactions transfusionnelles, l’administration d’un médicament comme la diphénhydramine ou l’acétaminophène avant la transfusion peut être envisagée. Le médicament doit être administré au bon moment pour qu’il fasse effet avant la transfusion.
- l’administration de furosémide pendant et après la transfusion peut être envisagée si le patient présente un risque accru de complications liées à une hyperhydratation.
Épreuves prétransfusionnelles
Les épreuves prétransfusionnelles permettent de vérifier la compatibilité entre le patient et les composants sanguins.
Les erreurs d’identification des patients et d’étiquetage des échantillons de sang peuvent mener à la transfusion de sang non compatible ainsi qu’à d’éventuelles réactions transfusionnelles hémolytiques11. Ces erreurs peuvent survenir à divers moments du processus de transfusion, y compris lors du prélèvement des échantillons de sang et des analyses, ainsi qu’au moment de la réquisition, de la délivrance et de la transfusion des unités de sang. Il est donc impératif de vérifier l’identité du patient tout au long du processus.
Les échantillons de sang prétransfusionnels d’un patient sont étiquetés au moment où ils sont prélevés, au chevet du patient. Ils comportent au moins deux numéros d’identification uniques. Une identification positive du patient doit avoir lieu à ce moment. Son nom et son numéro d’identification unique sont vérifiés sur son bracelet d’identité. Chaque fois que cela est possible, il faut vérifier l’exactitude des informations inscrites sur le bracelet du patient en lui demandant d’épeler son nom et de donner sa date de naissance.
Pour prévenir la transfusion de produits sanguins non compatibles, l’établissement peut, par l’intermédiaire d’une politique, exiger la confirmation du groupe sanguin des patients qui reçoivent une transfusion pour la première fois ou utiliser un système d’identification positive au chevet des patients pour vérifier les identificateurs des unités de produit sanguin délivrées et du patient1.
Pour en savoir plus sur les épreuves prétransfusionnelles, y compris l’identification des patients et l’étiquetage des échantillons, consultez le chapitre 8 du présent guide.
Les épreuves prétransfusionnelles et la recherche d’unités de culot globulaire compatibles sont des processus généralement simples, qui peuvent s’avérer longs et compliqués en présence d’anticorps. S’il existe un besoin urgent de culot globulaire avant que les épreuves transfusionnelles soient terminées, le service de transfusion doit en être immédiatement informé. En pareil cas, des unités de culots globulaires pourraient être utilisées même si les épreuves ne sont pas terminées, suivant les politiques et procédures de l’établissement ou après consultation avec le spécialiste en médecine transfusionnelle et le médecin traitant.
Accès intraveineux
Les composants sanguins et les produits plasmatiques peuvent être administrés par divers dispositifs d’accès veineux central (VVC) ou cathéters intraveineux périphériques (VVP). Les facteurs à considérer dans le choix d’un accès intraveineux approprié sont notamment les suivants :
- Le calibre du cathéter et des voies doit être assez large pour permettre l’écoulement du composant sanguin ou du produit plasmatique dans le délai indiqué et empêcher l’endommagement des cellules12
- de 20 à 22 G pour les transfusions de routine chez les adultes12; {Lima, 2015 #769}
- de 16 à 18 G pour les transfusions rapides chez les adultes12;
- chez les patients adultes ayant des veines fragiles ou difficiles, un calibre plus petit peut être utilisé, ce qui pourrait limiter le débit de l’écoulement13;
- un calibre de 22 à 25 G est recommandé pour les enfants14, 15.
- L’accès veineux pour la transfusion de composants sanguins ou de produits plasmatiques doit être distinct de celui utilisé pour administrer des médicaments.
- Un dispositif VVC à voies multiples permet d’administrer des composants sanguins ou des produits plasmatiques par une voie, et des médicaments et des solutés par d’autres.
- Dans la mesure du possible, il convient de ne pas administrer de médicaments connus pour provoquer des effets indésirables en même temps qu’un composant sanguin ou qu’un produit plasmatique, car il peut être difficile de faire la distinction entre les symptômes attribuables à un médicament et les réactions transfusionnelles.
- S’il s’avère nécessaire de transfuser différents composants et produits sanguins en même temps, un accès intraveineux distinct doit être utilisé pour chaque produit.
Dispositifs de transfusion
Les dispositifs de transfusion diffèrent selon que l’on administre des composants sanguins ou des produits plasmatiques. Les exigences à cet égard doivent être décrites dans une politique propre à l’établissement, laquelle doit être élaborée en consultation avec le service de transfusion.
Dispositifs pour composants sanguins
L’administration de composants sanguins nécessite l’utilisation d’un filtre standard dont la porosité peut varier entre 170 et 260 microns. La membrane de filtration, qui doit être entièrement recouverte par le composant sanguin, sert à intercepter les caillots, les débris cellulaires et les protéines coagulées.
Il n’est plus nécessaire d’utiliser un filtre de déleucocytation pendant la transfusion, car tous les composants sanguins distribués au Canada sont déleucocytés par filtration pendant la préparation (voir la circulaire d’information16 de la Société canadienne du sang à ce sujet ainsi que le chapitre 2 du présent guide)17.
Les composants sanguins doivent être transfusés dans les quatre heures suivant leur délivrance. Si la transfusion est interrompue pour quelque raison que ce soit, il faut cesser d’administrer le produit après quatre heures, même si la transfusion n’est pas terminée. Les établissements doivent s’en remettre aux recommandations du fabricant et à la politique locale en ce qui concerne le changement de dispositifs de transfusion. Lors d’une transfusion impliquant plusieurs unités, s’il y a un délai entre l’administration d’une unité et la suivante, le dispositif doit être changé pour minimiser les risques de prolifération bactérienne.
Dispositifs pour produits plasmatiques
Le matériel qui sert à administrer les produits plasmatiques est varié et diffère selon le type de produits et la marque. L’administration de produits plasmatiques par voie intraveineuse peut nécessiter l’utilisation d’un dispositif intraveineux standard à évent ou à filtre; elle peut se faire également par injection intraveineuse directe. Certains produits plasmatiques sont administrés par voie intramusculaire ou sous-cutanée. Les établissements doivent se référer à la monographie des produits ou aux politiques locales pour savoir s’il est nécessaire d’utiliser un système de filtration pendant la reconstitution ou l’administration.
Dispositifs de perfusion
Tout le matériel de transfusion doit être approuvé par Santé Canada et par le fabricant. Par mesure de sécurité, il doit faire l’objet d’un entretien régulier conformément aux instructions des fabricants. Chaque établissement doit avoir une procédure approuvée pour l’inspection et la validation continues des dispositifs de perfusion.
Les dispositifs de perfusion — ou perfuseurs — peuvent entraîner une hémolyse mécanique18. Par conséquent, avant de les utiliser, il convient d’obtenir auprès du fabricant la confirmation qu’ils ont été approuvés pour la transfusion de composants sanguins. Pour plus d’informations sur les causes de l’hémolyse mécanique, voir le chapitre 10 du présent guide.
Les perfuseurs peuvent servir à transfuser des composants sanguins (pompes à perfusion, perfuseurs rapides, réchauffe-sang et dispositifs de perfusion à pression). L’utilisation de perfuseurs doit toujours être conforme aux politiques de l’établissement.
Dispositifs de perfusion à pression
On peut utiliser un perfuseur à pression pour administrer rapidement un composant sanguin. La pression appliquée ne doit pas dépasser 300 mm Hg; une pression plus élevée peut provoquer une hémolyse ou l’éclatement de la poche.
Réchauffe-sang
L’utilisation d’un réchauffe-sang peut prévenir l’hypothermie lorsque l’on administre rapidement un composant sanguin froid à un patient, par exemple, durant une intervention chirurgicale ou en traumatologie12, 19. On peut également l’utiliser dans le cadre de transfusions régulières à des patients atteints de la maladie des agglutinines froides — il existe toutefois peu de preuves de l’efficacité de cette stratégie. Le réchauffement du patient est vraisemblablement plus réalisable et tout aussi susceptible d’être bénéfique20. Les réchauffe-sang doivent être équipés d’un système d’alerte qui se déclenche si la température dépasse 42 °C. En cas de recours à un réchauffe-sang, la température initiale et un numéro identifiant l’appareil (p. ex. numéro de série) doivent être consignés.
Évaluation de l’état du patient
Une évaluation de l’état du patient, y compris la mesure de ses signes vitaux, doit être effectuée dans les 30 minutes précédant la transfusion, et les résultats doivent être consignés au dossier. Tout risque de réaction transfusionnelle ou tout symptôme préexistant (p. ex. éruption cutanée) susceptible d’être confondu avec une réaction transfusionnelle doit être identifié.
Si le patient est en mesure de collaborer, il convient de lui faire comprendre l’importance de signaler sans délai tout nouveau symptôme qu’il pourrait ressentir pendant ou après la transfusion.
Tout traitement médicamenteux doit être préparé et administré selon la prescription (p. ex. 30 minutes avant le début de la transfusion, immédiatement avant la transfusion, etc.).
Transport et entreposage
Les composants sanguins et les produits plasmatiques doivent être entreposés dans un endroit où la température est contrôlée, et doivent être transportés à l’aide d’un système validé. Les systèmes de stockage et de transport sont validés et contrôlés par le service de transfusion8.
Tous les préparatifs en vue de l’administration des composants sanguins ou produits plasmatiques doivent être terminés avant d’aller les prendre. Il faut également vérifier la présence de l’ordonnance de transfusion et du consentement éclairé du patient dans le dossier.
L’obtention des composants sanguins ou produits plasmatiques à transfuser auprès du service de transfusion ou d’un autre site doit se faire conformément aux procédures de l’établissement. Il est impératif de confirmer l’identité du patient encore une fois à cette étape et de vérifier que les produits délivrés sont les bons.
Si les produits obtenus ne sont plus requis, il faut les retourner immédiatement au service de transfusion pour garantir des conditions de conservation sécuritaire et éviter le gaspillage. Les délais et les températures à respecter pour le retour des composants sanguins et des produits plasmatiques au service de transfusion peuvent être dictés par des politiques locales.
Transfusion
Contrôle de sécurité préalable à la transfusion
Le contrôle de sécurité préalable à la transfusion comprend la vérification du composant sanguin ou produit plasmatique et des informations d’identification du patient sur le produit. Les informations d’identification reliant le patient au composant sanguin ou produit plasmatique doivent correspondre. Le contrôle de l’identité du patient et du numéro d’identification du produit doit se faire au moyen du bracelet d’identification du patient, en présence de celui-ci.
Le contrôle de sécurité prétransfusionnel comporte plusieurs étapes importantes, à savoir :
- Vérifier que le produit à transfuser correspond à celui indiqué sur l’ordonnance de transfusion et que toute préparation particulière exigée a été effectuée.
- Vérifier que les informations figurant sur l’étiquette du composant sanguin ou produit plasmatique correspondent à celles indiquées sur le formulaire ou le bordereau du service de transfusion. Vérifier la date et l’heure d’expiration du produit à transfuser.
- Les établissements doivent avoir une politique encadrant l’utilisation des unités presque périmées. L’une des stratégies employées par de nombreux services de transfusion est d’amorcer la transfusion avant que le produit ne soit périmé et de faire en sorte qu’elle se termine dans un délai de quatre heures à compter du début21.
- S’assurer qu’il y a compatibilité ABO et Rh entre le produit et le patient (voir tableaux 1 et 2). Vérifier que le groupe sanguin inscrit sur le bordereau du produit correspond à celui indiqué sur l’étiquette du produit et que l’épreuve de compatibilité croisée (crossmatch) indique une compatibilité.
- Faire une inspection visuelle de l’unité à transfuser : vérifier qu’il n’y a aucun caillot, grumeau ou signe de décoloration (voir le Outil d'inspection visuelle de la Société canadienne du sang). Si de telles irrégularités sont observées, en informer le service de transfusion et renvoyer le produit. Pour les protéines plasmatiques sous forme de poudre lyophilisée, inspecter la solution après la reconstitution.
- Confirmer que les identificateurs uniques du patient indiqués sur le produit correspondent aux informations inscrites sur le bracelet d’identification du patient.
Toujours suivre les politiques de l’établissement pour la vérification du produit à transfuser et des informations d’identification du patient.
Tableau 1 : Compatibilité ABO
Groupe sanguin du patient | Antigènes érythrocytaires du patient | Anticorps présents dans le sang du patient | Culot globulaire | Plasma | Plaquettes |
---|---|---|---|---|---|
A | A | Anti-B | A, O | A, AB | A, AB, B, O |
B | B | Anti-A | B, O | B, AB | B, AB, A, O |
AB | A, B | AUCUN | AB, O, A, B | AB | AB, A, B, O |
O | AUCUN | Anti-A et Anti-B | O | A, B, AB, O | O, AB, A, B |
Tableau 2 : Compatibilité Rh
Patient | Compatibilité |
---|---|
Rh+ | Rh+ ou Rh- |
Rh- | Rh- |
* En cas d’urgence, si l’on veut utiliser du culot globulaire Rh positif et qu’aucun test de compatibilité croisée ne peut être réalisé, se référer aux politiques et procédures de l’établissement lorsque le patient est Rh négatif, car il est possible de transfuser du culot globulaire Rh positif aux femmes de plus de 45 ans et aux hommes Rh négatif.
Selon le composant sanguin ou les protéines plasmatiques à transfuser, d’autres exigences s’appliquent. Voir le tableau 3 pour un résumé des exigences relatives à la transfusion14.
Comme mentionné précédemment, les erreurs d’identification peuvent survenir à plusieurs étapes du processus transfusionnel; il est donc impératif de vérifier l’identité du patient tout au long du processus. Contrôler l’identité du patient immédiatement avant l’administration d’un composant sanguin ou produit plasmatique représente la dernière occasion d’empêcher toute erreur d’identification de causer du tort au patient.
Acte transfusionnel
La liste suivante résume les étapes à suivre avant l’acte transfusionnel proprement dit.
1. Passer en revue l’ordonnance de transfusion.
2. Vérifier le consentement à la transfusion.
3. Expliquer au patient le déroulement de la transfusion à venir (p. ex. préparation, surveillance requise, symptômes à signaler immédiatement).
4. Vérifier les épreuves prétransfusionnelles ou prélever un échantillon prétransfusionnel (s’il y a lieu).
5. Rassembler tout le matériel nécessaire.
6. Évaluer l’état du patient et relever ses signes vitaux dans les 30 minutes précédant la transfusion.
7. Administrer les médicaments, s’il y a lieu.
8. Aller chercher le produit sanguin (composant sanguin ou produit plasmatique) là où il est conservé ou l’obtenir auprès du laboratoire de médecine transfusionnelle.
9. Procéder aux contrôles prétransfusionnels (se reporter aux politiques et procédures de l’établissement).
10. Consigner l’information liée aux contrôles prétransfusionnels, y compris la date et l’heure de leur exécution et l’identité des personnes qui les ont effectués.
11. Se préparer à la transfusion du produit :
- Composant sanguin : purger la tubulure munie d’un filtre avec le composant sanguin ou un soluté approprié (p. ex. solution stérile de chlorure de sodium [NaCl] à 0,9 % pour intraveineuses).
- Protéines plasmatiques : reconstituer le produit s’il y a lieu. Se reporter aux procédures de l’établissement ou à la monographie du produit pour choisir le matériel et les solutés appropriés pour l’administration du produit par voie intraveineuse, intramusculaire ou sous-cutanée.
Tableau 3 : Résumé des exigences relatives à la transfusion
Composant sanguin | Indication | Compatibilité | Administration |
---|---|---|---|
Culot globulaire |
|
|
|
Plaquettes |
|
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|
Plasma |
|
* Pour les situations d’urgence ou d’hémorragie massive, certains services de transfusion ont peut-être des politiques permettant d’utiliser du plasma de groupe A pour les patients dont le groupe sanguin est inconnu. |
|
Cryoprécipité |
|
|
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Protéines plasmatiques |
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Surveillance des patients
Des réactions graves et mortelles peuvent se produire de façon imprévisible et progresser rapidement. C’est pourquoi les patients doivent être surveillés de près pendant et après la transfusion en conformité avec la politique de l’établissement à cet égard. Ainsi, il est essentiel de demeurer avec le patient ou se placer de manière à pouvoir l’observer de près pendant les 5 à 15 premières minutes après le début de la transfusion de chaque unité. Il faut être à l’affût de tout signe ou symptôme de réaction transfusionnelle : éruption cutanée, démangeaisons, état fébrile, frissons, difficultés respiratoires, douleurs et tout autre changement notable. Le patient ou la personne l’accompagnant sont invités à alerter immédiatement le personnel infirmier si de tels symptômes sont observés. Le patient doit être réévalué et ses signes vitaux relevés de nouveau au bout de 15 minutes. S’il n’y a aucune réaction transfusionnelle, le débit de la transfusion peut être augmenté12.
La surveillance du patient et l’enregistrement de ses signes vitaux sont déterminés en fonction de l’état clinique du patient et doivent se faire en conformité avec la politique de l’établissement pendant toute la durée de la transfusion.
En cas de suspicion d’une réaction transfusionnelle, il faut cesser immédiatement la transfusion, mais conserver un accès vasculaire avec du soluté physiologique. Pour gérer la réaction transfusionnelle suspectée, il importe de suivre la procédure de l’établissement ou les consignes du médecin. Pour plus d’informations, voir le chapitre 10 du présent guide.
Après la transfusion
À la fin de la transfusion, la tubulure du dispositif de transfusion doit être rincée :
- Composants sanguins : une solution stérile de chlorure de sodium [NaCl] à 0,9 % peut être employée; utiliser les plus petits volumes pour les patients à l’apport hydrique restreint.
- Protéines plasmatiques : un fluide compatible peut être employé pour rincer le dispositif d’administration intraveineux (se reporter à la monographie du produit); utiliser les plus petits volumes pour les patients à l’apport hydrique restreint.
Une fois vide, la poche de l’unité transfusée et tout matériel d’administration doivent être jetés de façon sécuritaire, conformément à la politique de l’établissement.
Les détails de la transfusion doivent être inscrits au dossier, conformément aux politiques et procédures de l’établissement. Ils doivent comprendre la date, l’heure du début et de la fin, le composant sanguin ou produit plasmatique transfusé, le numéro de l’unité ou du lot, le nom des personnes chargées de la transfusion et de la surveillance du patient, les relevés des signes vitaux, le volume transfusé et toutes les interventions liées à l’acte transfusionnel. En ce qui concerne les patients hospitalisés qui reçoivent un composant sanguin ou un produit plasmatique, ils doivent être informés du fait qu’ils ont reçu une transfusion, selon le mécanisme privilégié par l’établissement8.
Les patients non hospitalisés et les personnes qui s’occupent d’eux doivent être informés des soins post-transfusionnels. Il convient de leur remettre un document indiquant les signes et les symptômes possibles d’une réaction transfusionnelle, les mesures à prendre en cas de réaction et les instances à contacter pour signaler la réaction transfusionnelle.
Les signes ou symptômes de réaction transfusionnelle doivent continuer d’être surveillés après la transfusion. De manière générale, tout changement dans l’état ou les signes vitaux du patient survenant dans les six heures suivant la transfusion doit être considéré comme une réaction transfusionnelle et être signalé au service de transfusion. Tout soupçon de réaction transfusionnelle doit être communiqué au service de transfusion.
Transfusion continue de facteurs de coagulation
Très utilisée au Canada, la transfusion continue de facteurs de coagulation permet de gérer et d’empêcher les hémorragies qui surviennent chez les patients présentant une coagulopathie.
Comme cette procédure ne fait pas partie des recommandations indiquées dans la monographie des produits, chaque établissement doit élaborer ses propres politiques et procédures concernant cette pratique.
Crédits de développement professionnel continu
Les associés et les professionnels de la santé qui participent au Programme de maintien du certificat du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada peuvent demander que la lecture du Guide de la pratique transfusionnelle soit reconnue comme activité de développement professionnel continu au titre de la section 2 – Activités d’auto-apprentissage. La lecture d’un chapitre donne droit à deux crédits.
Les technologistes médicaux qui participent au Programme d’enrichissement professionnel (PEP) de la Société canadienne de science de laboratoire médical peuvent demander que la lecture du Guide de la pratique transfusionnelle soit reconnue en tant qu’activité non vérifiée.
Remerciements
L’auteure remercie Leonor De Biasio, RN, B.Sc.N, CPNC, et Tihiro Rymer, B.Sc.N, MLT, qui ont rédigé la version précédente du présent chapitre, ainsi que Allahna Elahie, B.Sc. (avec distinction), MLT, et Sarah Oxley, RN, B.Sc.N, pour la révision de la présente version.
Si vous avez des questions ou des suggestions d’amélioration concernant le Guide de la pratique transfusionnelle, veuillez communiquer avec nous par l’entremise de notre formulaire.
Références
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- Société canadienne de médecine transfusionnelle. Normes pour services transfusionnels en milieu hospitalier. Publié à Ottawa, 2017.
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